Et crie donc si tu ne peux pas faire autrement
J’ai arrêté d’écrire.
Il y a une époque, que les moins de six ou sept ans ne peuvent
pas connaître, où j’écrivais des lettres.
Pendant les vacances, je prenais mon stylo avec plaisir et
envie et je remplissais une bonne carte postale que j’accompagnais souvent d’une
ou deux feuilles de papier trouvées dans un calepin, un cahier traînant, un
ticket de caisse…
J’écrivais tout et n’importe quoi lorsque je racontais mes
semaines ailleurs.
Je me rappelle de certaines innommables diatribes qui
déliraient et m’auto-satisfaisaient. Je racontais des romans à partir d’anecdotes
banales, j’usais de jeux de mots usés, je tentais des styles.
Ces lettres partaient pour quelques amis. De ceux à qui je n’aurais
écrit qu’une seule lettre à ceux avec lesquels je continue de correspondre
aujourd’hui, bien que par politesse.
En retour, j’avais trois mots sur une autre carte postale.
Beau temps, chouette, bientôt fini. Cela voulait dire cela.
Quelque fois je tombais sur une autre lettre qui me mettait en
concurrence et à laquelle je n’hésitais pas à répondre tout en surenchérissant d’humour
qui ne faisait rire que son auteur.
Il est des gens dont l’écriture simple n’est pas un plaisir.
Il est des gens qui ne font pas de blog (si, si).
J’ai envoyé tant de mots qui ont disparu aujourd’hui.
J’aimerai les relire, juste pour savoir ce que je disais. Juste
par curiosité.
Je me rappelle qu’il y avait des sentiments dans ces lettres. Je
n’ai rien ou presque à lire en retour. A croire que mes messages étaient postés
dans des bouteilles.
Certains de ceux qui recevaient me demandaient comment. Je
disais je ne sais pas, c’est comme ça.
J’en ai retrouvé certaines dont j’ai aujourd’hui une autre
lecture. Des phrases apparaissent avec une telle évidence alors que je les
avais parcouru en courant avant. Inattentif et naïf que je suis.
Ma boite à chaussures n’est pas aussi pleine qu’elle aurait pu
l’être.
Désormais, cette écriture est devenue difficile, hésitante. On
ne se livre pas aussi facilement qu’avant.
Le courrier des vacances est devenu corvée.
J’ai arrêté d’écrire.
J’écris tous les jours ou presque.
Il y a des mots qui me viennent, différents d’avant, des
phrases que je n’aurai osé écrire avant.
Il n’y a pas de mérite à cela.
Je ne sais pas vraiment pourquoi je le fais. Il y a des
personnes qui ne le sauront jamais –il ne
faut jamais dire jamais-.
On dit c’était mieux avant. Cela dépend. Comme d’habitude.
Une seule chose n’a pas changé. J’écris toujours pour la même personne.
Inspiration: Cette belle note.