Nainniversaire - la vérité
Y’a des week-ends comme ça qui épuisent plus que de raison et
qu’un web.
Le samedi aux pays des nains et le dimanche re-belotte pour la famille. Qui a
inventé les anniversaires ?
De bonne grâce et avec mes qualités substantielles, j’ai donc dû
subir les assauts d’une bande de gnomes. Je ne sais même pas combien il y en
avait, peut-être y en a-t-il encore suspendus dans les bosquets.
Je n’avais pas fini de monter le premier but dans le garage que
des voix inconnues me parvenaient.
Quelques minutes après, je me suis décidé à mettre le nez
dehors avec les montants incomplets. Ce qui était le jardin précédemment était
méconnaissable : les bureaux des enfants dans le gazon étaient submergés
par des tonnes de pâte à modeler, d’appareils à bulles, des crayons et je ne
sais quoi d’autre, des ballons flottaient, traînaient, était accrochés partout,
des enfants que je ne connaissais pas couraient en beuglant à travers la
pelouse délicatement tondue de la veille au soir, des adultes continuaient de
déposer des marmots au portail.
D’ailleurs, au portail, je voyais deux ballons, signe
cabalistique de l’anniversaire de nains. Cette fois ci, c’était au tour des
autres parents de passer devant chez moi avec un sourire sadique aux lèvres.
J’ai tenu trois secondes sans me faire remarquer.
J’ai dit bonjour à tout hasard sans qu’un de ces effrontés ne
me répondent trop occupés à se sauter dessus à pieds joints en criant que
c’était lui le chat.
Puis l’un des nains, au gilet bariolé, s’est approché :
c’est quoi dis ?
- c’est un but ?
- un but ?
- oui, un but de foot.
- mais il est bizarre ton but.
- ce n’est que la première moitié (‘tit con, ça se monte pas tout seul, une seconde, j’ai même une ampoule
à cause du tournevis), je vais aller chercher l’autre moitié.
Je ne sais pas si le foot a été dit trop fort ou non mais je me
suis fait suivre dans le sous-sol par plein de petits garçons qui me
regardaient porter l’autre moitié. (J’ai
manqué à ce moment là de présence d’esprit car j’aurai pu me débarrasser d’un
ou deux avec tous les outils).
Je finissais d’emboîter le but et de mettre les filets que les
nains se taclaient déjà à la gorge.
J’ai cru être tranquille vingt autres minutes si ce n’est pas
Julien la mascotte qui m’avait adopté.
- et ça, ça sert à quoi ? c’est pas trop dur ?
pourquoi t’écoute de la musique ? ça se met où ce truc ? t’as vu
c’est rouge et y’en a des bleus ? t’as fini quand ? il est cassé ce
machin non ?
Que faisais-je près de mon établi avec cette demie portion que je ne connaissais pas à
monter un but de foot ?
Une fois les deux buts fixés, ils se mirent à courir partout
avec trois balles pendant deux minutes avant de passer à autre chose. Je
regardais le terrain déserté en jurant.
Je ne pouvais plus partir, la mère de mes enfants me
surveillait du coin de l’œil. Je me suis retrouvé à gonfler des ballons jusqu’à
tomber dans les pommes, à faire des bulles qui m’éclataient dans les pupilles,
je voyais des boulettes non identifiées voler, les rosiers se faisaient
découper à la hache-baton.
Puis il y eu le goûter des fauves, des miettes partout, du jus
de fruit renversé, des bonbons enfournés, des gosses qui ne tenaient pas en
place plus de trente secondes. La maison en plastique fut démontée et je ne
sais pas comment ils faisaient mais j’avais toujours l’impression qu’ils
étaient quinze dedans.
Notre nain était surexcité et je m’apercevais de la mauvaise
influence du copain blond.
Il y avait les deux frères fans de foot qui se piétinaient pour
le ballon, le petit bonhomme réservé qu’avait l’air d’apprécier la seule fille
de la troupe, son petit frère maquillé en clown à la truelle. Je regardais
ma montre et le temps s’était arrêté.Il y eu la course aux trésors pour achever les fleurs.
Je demandais à tout hasard à Madame qui gérait le tout en
parfaite professionnelle (il y avait même une trousse à pharmacie sur le rebord
de la fenêtre) si les mamans des nains étaient mignonnes.
Ma nièce aide de camp n’en finissait plus de maquiller à tour
de bras.
Ils étaient tous rouge et dégoulinants de sueur.
Je ne lâchais pas le chien pour qu’ils ne décident pas de faire
une chasse à l’ours suivie d’un méchoui.
Puis, petit à petit, ils sont partis sous le regard
compatissant des parents envers nous.
Ranger, nettoyer. Recommencer le lendemain.
Le soir, ma fille de 4 ans faisait sa liste d’invités.