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Le Bar Nabé
28 avril 2007

Présence

C’est arrivé deux fois en quelques semaines, deux fois où nous (ou je tout seul aussi) étions sans les enfants.
C’est une sensation curieuse, cette absence d’agitation dans la maison, ces pièces vides où l’on ne va plus, ce silence, ce temps octroyé, bizarre, presque trop de temps soudainement. 

Tout seul, pendant quelques jours, le début est plaisant, une sorte de pause prise et bienvenue, pas nécessaire mais appréciée.
C’était simple, des repas rapides, un rythme choisi, aucune contrainte particulière.
Les heures défilaient quelquefois rapidement, quelquefois lentement, avec cette impression marquée d’une drôle d’inutilité.

Tout au fond de ses pensées, latentes, il y a ces questions, si tout se passe bien là-bas, que font-ils. Il y a ces perturbations des habitudes, ces moments où tous les jours ou toutes les semaines, à ces heures là, nous faisions certaines choses.
Evident, il y a ce manque, de les voir, de les savoir à dix mètres, de les entendre, d’un bisou d’elle, d’une chamaillerie de lui.
Ça a toujours été, depuis le début, parce qu’au bout du compte, il y a eu peu de séparations de quelques jours. 

De ce temps d’avant, sans enfants, il est désormais imaginable comme un autre monde, un monde ayant existé, que l’on ne peut plus visiter, tout juste peut-on revoir des photos. Ces clichés s’éloignent de plus en plus, ce qui était un réel repère avant n’est plus même revu depuis des lustres.
Depuis bientôt sept années, l’incohérence de ma vie d’avant s’intensifie. Je ne sais même plus comment je vivais avec Elle sans eux. Alors, avant Elle, tentons parfois d’y reposer un œil. Juste. 

Alors, ces quelques fois où je suis seul, suffisamment longtemps pour le ressentir, ce serait presque une sorte de culpabilité de profiter égoïstement, et en fait de ne pas profiter ce temps avec eux.
Tout s’accélère.
Je les entends par de là le téléphone, des paroles. Je sais qu’ils n’auront pas grandi de trente centimètres en une semaine, je sais qu’ils n’auront pas changé tant que ça, mais il y aura de nouvelles expressions, des souvenirs qui me paraitront étrangers, des références qui me manqueront et d’autres détails qui n’en sont pas.

Au retour, les savoir à proximité est un soulagement, comme si je pouvais de nouveau maîtriser ce qu’ils deviennent, faussement maîtriser.
Ne plus rien rater d’eux, avoir cette impression, suffisante que je suis là. 

Et cinq minutes plus tard, ils se taperont dessus, feront plus de bruits qu’on en les croirait capables, et je penserai à ce silence, étrange. Je me dirai que de temps en temps, cette séparation n’est pas si difficile.
Et ils repartiront, peut-être l’année suivante, et je m’inquiéterai à l’avance, préférant cette présence indispensable. 

Ce que j’aurais aperçu un jour, accidentellement, m’a sauté aux yeux d’une telle évidence à leurs retours.

Peut-être un peu de soleil supplémentaire de là-bas, je ne sais.

Ça se déroule sur leurs nez et leurs pommettes, des toutes petites tâches de rousseur, adorables.
Et je repense à un visage de petit garçon du même âge qui les avait, voilà une trentaine d’années.
Ces petites tâches de rousseur qui réapparaissent sur mon visage aujourd’hui à la fin des vacances d’été arrosée de soleil.

rouss

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