Août-stilités
Remettre une paire de chaussettes. Un pantalon, allez donc
imaginer !
Raccrocher la montre au poignet. Signes instinctifs de l’aliénation
humaine à la société.
Certes que le port même pas altier de la chemise de sied à l’absence
de chaussette entre le bas de pantalon et la chaussure noire, mais après tout…
Et la montre, hein ? En plus, on ne regarde même plus l’heure
à la manche puisqu’elle est en bas, à droite de l’écran. Ou ailleurs pour les
pervers.
Bref, c’est la reprise quand tant s’en vont. Eux aussi auront
le droit aux questions : ça a été, sympa les vacances, beau temps, t’es
parti où, ah ouais, pas chaud quand même, reposé, content, prêt, en forme. Ils
y auront eux aussi dans quinze jours, vingt-et-un ou pire, ce droit de se faire
emmerder par ces gens qui vous interrogent le mord aux dents, bien heureux, même
pas au fond d’eux mais plutôt avec évidence, de vous voir de nouveau aux
manettes de votre labeur.
Ben oui, si on ne revient pas, on ne peut pas repartir.
Les vacances, ça se mérite. C’est pour le plaisir d’en profiter
encore la prochaine fois. Bande de cons.
Le gens d’entreprise, dans sa singularité, est sadique. Faudrait
pas partir avant les autres pour ne pas subir à son retour ceux qui ne sont pas
encore partis et tellement fiers de s’en aller tout de suite, là, bientôt.
Faudrait pas partir après non plus car les gens qui sont déjà
revenus depuis que vous êtes partis sont déjà bien énervés, sont déjà bien
agacés. Et une tête de rond de flan qui ramène sa fraise tout brun de
bronzitude et encore le sable aux joues fin août, ça doit se faire directement
engueulé et envoyé cueillir du tableau Excel et vider sa boite e-mail.
En fait, faudrait pas partir. Ou ne jamais revenir.
Et puis, il y a les pires, ceux de septembre. Ou ceux de juin.
Bien que ceux de juin ont la particularité de subir l’été des autres, les
normaux, les juilletistes ou les aoûtiens. On leur pardonne.
Mais ceux de septembre, ceux qui partent quand tout le monde
est rentré, quand le boulot recommence comme un jour pourri blindé d’octobre ou
de mai, quand il manque des jours pour finir ses journées, ceux-là, ce sont des
fourbes.
Sous prétexte qu’ils n’ont plus ou pas d’enfants et que c’est
moins cher et qu’ils évitent la cohue des idiots de l’été, ils vous laissent
avec des tonnes de paperasses parce qu’ils n’auront rien foutus pendant deux
mois.
Et ils s’en vont. Et je les conchie.
Le vacancier est un imbécile.
Surtout celui qui l’est quand je ne le suis pas.