Pollution visuelle
Ils ont raison de culpabiliser l’opinion publique.
Cela agitera les petits enfants dans les
chaumières, ils reviendront de l’école avec de grandes phrases graves, ils nous
expliqueront avec le grand sérieux que peuvent avoir les élèves de primaire,
que l’avenir de la planète est en jeu, que nous, adultes, sommes responsables
de tout cela, que l’Homme est méchant envers la Terre et les petits oiseaux.
Ils nous parlerons de l’eau qui coule
pendant qu’on se brosse les dents, des gaz d’échappements, de la pollution des
usines, de toutes ces dépenses électriques et nous ne saurons pas forcément
quoi dire. Sauf, des oui, oui, tu as raison.
Comment tu leur expliques qu les
méchants, ce n’est pas nous ?
Parce que oui, c’est vrai, nous avons
une part de responsabilité, mais elle est tellement faible par rapport aux
industries, par rapport aux politicards, aux économistes boursiers.
Alors bien sûr, c’est évident, il
nous faudra montrer l’exemple parce que c’est notre rôle, et aussi parce que ce
n’est pas plus mal.
Déjà, je ne mets aucun appareil en
pause. C’est bien non ? Même si je sais que la boite dans laquelle je
bosse laisse les lumières allumées la nuit et laisse couler l’eau des robinets.
Le salarié se conduit bien mieux chez lui, ou alors, il est con. Il y en a.
Peu importe, je sais je connais l’argumentaire,
les petites gouttes d’eau feront des grands fleuves.
Et nous économiserons une tranche d’une
seule centrale nucléaire pendant que dix mille nouveaux camions fleuriront sur
les routes.
Qu’est-ce tu veux que je lui dise ?
Que ce qu’on fait ne sert à rien. Ben non, nous ferons ceux qui croient que c’est
vraiment utile, que nos petits gestes sauvent la planète et leurs futurs petits
enfants.
Et pourtant, je sais bien que cette
conne d’Evelyne Dhéliat et son Défi pour la Terre post-météorologique, ses conseils
abrutissants, continuera de nous culpabiliser tous les jours.
Elle osera même, l’an prochain, nous
parler encore des cinq minutes de pause électrique avant vingt heures la veille
de l’évènement. Cinq minutes sans courant.
Mais le jour même, elle fermera sa
gueule, sur son TF1, à 19h56, juste avant la page de pub, parce que notre
esprit doit se concentrer sur une place de cerveau disponible plutôt que de
sauver la planète.
Comme ce dernier mardi.
TF1 et Evelyne sont comme nous, l’intérêt
personnel passe avant le général.