Veni, Vis site, ...(2)
La visite des châteaux de la belle Loire m’a
interpellé sur le plaisir que j’aurais éventuellement eu à vivre à cette
époque.
Encore aurait-il fallu que j’appartienne à la bonne
catégorie sociale (me rappelait ma ‘tite femme, toujours plus proche de la réalité
que moi, perdu dans mon imagination).
Que n’aurais-je alors couru après gentes
demoiselles pour les trousser dans les allées étroites du labyrinthes végétal
des jardins de Chenonceaux ?
Que n’aurais-je alors vaincu en duel ces
prétendants poilus pour aller voir, avec une mignonne, si la rose qui ce matin
avait éclose sa robe de pourpre au soleil !
Que n’aurais-je offert de châteaux en un geste
auguste de la main ou plutôt que n’aurais-je récupéré tout ce que je pouvais en
dot auprès de jeunes filles aisées ?
Chambord.
D’une architecture complexe et passionnante, le
château nous fait tourner la tête au détour des étages et des escaliers.
Il possède au centre du donjon un escalier en
double hélice hélicoïdale, exactement comme la représentation de la double
hélice d’ADN qui nous fait vivre.
La Nature m’épate car elle a déjà tout inventé bien
avant les constructions mentales humaines.
« Pour
ta chance le Roi François avait accepté que tu le construises une magnifique
escalier en colimaçon et il t'a fait vivre le restant de tes jours.
Le Roi
aurait-il soupçonné que cet escalier en double hélice contenait le code secret
de toutes les vies? »
Claudio
Guttierrez (à propos de Léonard de Vinci)
Etrangement, Chambord ne fut construit que pour
démontrer à la face de l’Europe la qualité et la puissance du pays.
Il aura fallu aller chercher en Italie les idées
mais la démonstration du pouvoir français est une évidence dès que l’on entre
dans la cour du château et que l’on se pâme naturellement devant les fastes
devantures.
Paraître était déjà l’essentiel.
François 1er avait les clés d’une
demeure qui ne l’a que peu accueilli. La cour est alors nomade dans ce 16ème
siècle, se déplace avec ses milliers de personnes et ses meubles (mobile >
mobilier ; ne me remerciez pas).
Nous avons pris part à la grande visite conférence
qui nous a emmené jusque sous les charpentes des toitures, en passant par ces
portes usuellement interdites au public.
Madame la guide, habillée de vert et tripotant nerveusement
son foulard, était cette sorte de professeur agrégée qui effraie les élèves
rien que de penser à ses cours.
Sans aucun doute ayant étudié rigoureusement Chambord
sous toutes les coutures des tapisseries, elle nous expliqua, à force de termes
souvent incongrus pour un architecte historique non reconnu de la profession
tel que moi, nombres de secrets de la demeure royale.
Elle cria quelques fois contre les enfants qui
faisaient trop de bruits, enguirlanda la jeune fille qui voulait s’asseoir sur
ce rebord pour une photo, nous faisait courir dans les couloirs tout en continuant
à parler (cela me rappelait affreusement ces profs de fac qui déblatéraient leurs
cours sans se soucier des étudiants).
Mais nous l’avons vu sourire. Une fois certes, mais
ce fut sur les terrasses de Chambord, à quelques mètres des sommets des
toitures.
En refermant derrière elle une des petites portes en
bois qui nous faisait sortir de sous les toits, elle avait enfermé une
canadienne et sa gamine sous les charpentes.
En fait, Chambord, ça ne se raconte pas, ça se
visite.
Note à moi-même : ces notes doivent être d’une chiantitude, ch’ais pas où t’as
perdu tes jeux de mots pourris et ton humour désastreux. Dire qu’il reste
encore d’autres châteaux.