Holy movie
Petites histoires sans prétention, il est des anecdotes qui se
retiennent avec un goût fraise gariguette. Un fruit précoce de la vie, aux
chairs encore fermes, qu’on croque sans se poser de questions sur sa durée de
conservation.
A cette époque de croisée des chemins où les études, ah les
études, prenaient le temps sans vraiment nous le rendre et où l’indépendance familiale
n’était qu’un point à l’horizon, en vue, mais sans discerner ses contours.
C’étaient des soirées entre amis, des sorties parisiennes, des rendez-vous
amoureux au bord de la Seine.
Il fallait bien qu’on se (re)trouve aussi, apprivoiser nos
univers, découvrir ce que pouvaient être les nuits à deux.
Alors ce furent des occasions calmes, juste nous, dans une
chambre peinte encore aux couleurs de l’adolescence, des samedis soirs en conclusion
heureuse de la semaine. Il y eu des films comme cela. Il n’y en eu pas d’autres fois.
Puisqu’il parait que j’étais de ceux qui cherchaient l’amour.Alors la cassette est ressortie, dernière séance, de mille neuf cent quatre vingt-huit à aujourd’hui. Les habits et coiffures étaient de ces années eighteens, c’était le récit d’un couple qui s’installait, de clichés et d’un bébé. L’enfant venait à la fin et représentait le début. Nous étions si loin de tout cela. Dans l’histoire, il y avait aussi des doutes, plus souvent de lui ; peu d’elle qui avançait avec sa force tranquille que les femmes sont capables d’avoir. Ou plutôt, elles ont des craintes dont elles ne parlent pas, parce que souvent aussi, elles sont plus fortes. Elles nous le font croire.
Elle me demandait : « Toi aussi, au moment de
dire oui, tu hésitais ? Tu te posais ce genre de questions ».
Oui, ces interrogations communes, l’engagement, une femme pour
une vie, le poids des responsabilités par rapport à la plume de la liberté. Des clichés,
je vous dis.
Je répondis : « Je ne sais plus ».
Bien sûr que ce n’était pas la bonne réponse. « Non, pas du
tout, j’étais sûr de moi ! » aurait été plus approprié.
Mais on ne sait jamais, je n’ai jamais su d’ailleurs. Juste des
certitudes rassurantes qui nous investissent et un éclair parfois. Est-ce
choquant ? Simplement, il y a des choses indéfinissables qui ne se
mesurent pas en mots. Je sais ce qui est bien et important, imagine que le mieux est
son ennemi.
Elle me disait : « Je me souviens de ces soirées
dans ta chambre, on regardait la télé et puis après… »
Il y avait un sourire. Elle se souvenait également de ce film,
des cinq minutes avant le générique qui embuent les rétines.
Ces poignées de secondes me donnent envie de poser la main sur son
ventre et de le sentir bouger, de recommencer une troisième fois. Juste un
plaisir instantané de grâce.
La vie en plus (1988)
Epilogue :
Et aujourd’hui ?
Elle a été chez le coiffeur hier après-midi.
Ouf, je m’en suis aperçu assez vite.