L'autre sens de l'homme
On dit toujours que les femmes ont un sixième sens, ce serait
une gageure d’affirmer que les hommes n’en ont pas. Enfin, pour ma part, je l’ai.
Que les gars se débrouillent avec leurs sens.
Par exemple, ce matin. Samedi, premier jour du week-end qui se lève au soleil. Bien sûr, à 6h20, quand la fille se réveille sans vouloir se rendormir, il n’y a pas de soleil, (je le rappelle : en semaine, nous la levons à 6h45 avec un treuil) ; maman y va, consciente qu’elle est en vacances fonctionnarisées pendant deux semaines et que son homme, non, négocie avec sa fille, s’énerve (j’entends tout à travers l’écouteur) et finit par revenir en grognant, en secouant la couette afin de bien s’assurer que je ne dormais pas et que si je ne veux pas qu’elle sorte les armes de destruction massive d’enfants lève-tôt, je dois être le prochain à me lever pour voir les marmots.
Donc, aux alentours de 7h, je monte chercher la môme et la
rapatrie dans le lit conjugal pour profiter des ses extrémités gelées qu’elle m’applique
dans le dos non sans un rire cristallin ponctué de reniflements apoétiques.
Vers 7h25, la petite veut petit-déjeuner et la maman, dans sa
grande bonté et consciente qu’elle est en
vacances fonctionnarisées pendant deux semaines et que son homme, non,
se lève pour remplir la mission.
Les rayons filtrent à travers les volets, je demande une
ouverture de fenêtre pour profiter de l’air du matin qui m’assoupira dans un
calme absolu.
Porte fermée, je tente de m’endormir sagement en rêvant à
Charlotte du boulot ou à la caissière brune de Truffaut de samedi dernier.
Bien sûr, au fond, il y a du bruit de pas pachydermique, de
toussotements, d’une télé qui beugle L’éfélant
de Winnie, mais je me love d’autant plus dans ma couche.
A 8h, pendant que madame est à l’étage pour habiller le fiston,
la cadette débarque dans la chambre pour me dire que c’est le matin, qu’il y a
du soleil. Je lui réponds que je suis fatigué et que je lui serai gré de se
barrer en vitesse avant que la table de nuit ne l’assomme.
A 8h37 (ce sont des horaires qu’on ne peut pas oublier), la
maman entre en trombe de cyclone en secouant bruyamment la poignée de porte
pour selon elle, récupérer des fringues.
Je dis : « mais quelle brute pour entrer comme
ça ?! »
Elle : « Ben, tu ferais mieux de te lever ».
Et elle s’en va vivement, fière sur son destrier d’argent,
sa culotte et une paire de chaussette à la main.
A 8h38 (heure h sensible + 1 min), bien sûr, j’étais debout. Il
ne faut pas jouer avec les femmes modernes qui s’affirment.
Je la croise, mon œil gauche encore fermé et avec la coupe de
Rod Stewart, dans la salle de bain : « Qu’y a-t-il ? Pourquoi tu
voulais que je me lève ? »
Elle : « Hein ? J’ai jamais dit ça »
Et elle ose me sortir une phrase qui ne rimait même pas avec le
« tu ferais mieux de te lever ».
Je fais un sourire et sort pour aller embrasser mes enfants –toujours
en pyjama d’ailleurs-.
Où voulais-je en venir, ah oui, le sixième sens des hommes. L’exemple est typique, je peux vous dire que les ragnagnas de madame arrivent incessamment sous peu.