Pente ou côte
Que faites-vous le 5 juin ?
Il y a une époque pas si lointaine, j’aurai pu faire la grasse
matinée jusqu’à 8h (soyons fou), profiter de la présence des bambins (soyons
fous aussi) et passer le lundi au soleil.
Mais le caniculaire été 2003 est passé par là et je dois me
montrer solidaire avec les personnes âgées. Je ne suis toujours pas persuadé
que mon travail supplémentaire a une quelconque réelle conséquence sur le
niveau d’hydrométrie interne des vieux et vieilles de ce pays.
En plus, pensez donc comme je m’en fiche, je n’ai plus de
grands-parents.
Bon, fini de rigoler grassement avec cet air en coin.
Je suis large et accepte de passer l’éponge électorale sur les
conséquences de ce jour travaillé supplémentaire (nous sommes assez bien lotis
en France de ce point de vue là, je suis de bonne composition, j’ai bien dormi,
c’est le printemps, je suis de bonne humeur, là n’est pas la question).
Cependant, je m’étonne en un éclair que de grandes fratries
(contre l’adversité) de fonctionnaires profitent encore de leurs acquis
immémoriaux.
Donc, l’Education Nationale a décidé que les écoles seront
fermées ce jour là. Reste peut-être une rentrée administrative revue plus tôt
en août pour les professeurs ou quelques poignées d’heures morcelées en
secondes et dispersées de ci de là en suivant la méthode peu originale des
transports en commun publics qui font un calcul savant d’une journée répartie
en minutes supplémentaires invisibles.
Je reçois d’hier une belle lettre bien amenée de La Poste
m’indiquant que le courrier ne sera pas distribué dans l’entreprise. Bigre
alors, je ne comprends rien à leur justification mais ils me disent que c’est
pour mon bien et pour le maintient de la qualité de service.
Oh je sais ce que vous allez me dire, les fonctionnaires, c’est
un sujet bateau, facile, et même notre 1er Ministre, fin comme un
oiseau en plein Amococadix breton, y va de sa petite phrase maladroite (et si
honnête) [1].
Mais je m’en fiche presque (presque = pas totalement). Qu’ils
profitent, après tout, tant mieux pour eux et je serais bien aise d’avoir
ce 5 juin trafiqué égoïstement.
Mais les conséquences mes chers lecteurs et trices, les
conséquences !
Je n’entends aucun syndicat de la fonction publique beugler que
l’organisation qu’ils ont faite de la journée nationale de Solidarité rend
aussi service au privé. Il y a bien des choses qu’il ne faut pas mélanger quand
ça n’arrange pas.
Le fait est que la plupart des entreprises du secteur privé
(qui en général traite le problème le sujet du lundi de Pentecôte sur un coin
de table de réunion) sera ouverte ce jour là, que les salariés devront donc se
rendre à leurs postes de travail, qu’ils seront bien obligés de poser un RTT ou un CP
pour garder leurs enfants. Tiens, ça me rappelle étrangement une situation de
jour de grève (je conviens que la comparaison n’est pas flatteuse).
Et là, subrepticement, naît dans mon esprit de travailleur du
privé, cette drôle d’impression qui se conclut par le sentiment de m’être fait
carotter un jour de congés pour la gloire de mon beau pays.
(Et il faut que vous vous rendiez bien compte des efforts
incommensurables déployés avec souffrance pour rester poli alors que je pourrai
avoir des difficultés à m’asseoir).
Mais en fait, vous voyez, tel que cela se présente, je m’en
fiche puisque Madame est professeur des écoles et gardera les nains.
C’est juste pour parler.
[1] A un parterre de journalistes, le 15 mai, Dominique rétorque:
« Vous êtes là comme des fonctionnaires, comme des moules accrochées au
rocher ! ».