L'hymne immatériel
Il suffit de le vouloir un tout petit
peu.
Noël est presque déjà fini avec ses
lots de choses matérielles.
Pendant que Madame préparait le
réveillon (j’vous raconte pas là), je tentais un nouveau Pôle Express auprès des enfants.
Le précédent, en ce 24 décembre 2005,
ne fut pas une réussite malgré ma satisfaction toute personnelle. Sûr que le
home cinéma garait le train dans le salon avec coups de tchou tchou qui faisait
vibrer le sol et le canapé. Le Pôle Express était donc un film effrayant car
trop bruyant.
Donc, le 24 décembre 2006, j’abordais
le problème différemment avec un son classique suffisant. La cadette allongée
avec sa tête sur mes genoux, le grand sur le bord de l’escalier avec son air de
ne pas regarder mais quand même un petit peu.
Le gamin télévisé était cette année
encore dans son âge critique, celui d’un basculement irréversible vers un
premier rêve qui s’échappe. Le grand ne nous avait pas encore posé la question
attendue du haut de ses six ans : dites, il existe le Père Noël ?
Non, c’était toujours aujourd’hui une
évidence, le bonhomme au gros pif et gros bide, habillé de rouge et de fanfreluches,
équipé d’une hotte, d’un troupeau de rennes et d’une armée de lutins espiègles
et corvéables non syndicalisés est vivant dans l’esprit des enfants.
Il continue de voir à travers le toit
les bêtises même si cela n’a que peu d’effet sur l’excitation des monstres, il
continue de descendre par la cheminée au feu éteint (ou alors avec un habit
ignifugé), il maîtrise cette magie qui lui fait parcourir le Monde en une nuit
(mieux qu’Air France et que la
SNCF réunies).
Je pouvais même les laisser regarder
le film plusieurs dizaines de minutes, dans leur subjugation béâte. Ils ne
bronchaient pas et je revenais vers la fin.
Il y a ce grelot qui ne tinte que
dans l’esprit des rêveurs, des croyants aux mythes, peu importe leurs
commercialisations. Il tinte à tout berzingue dans leurs petites têtes, encore
un peu dans la mienne. C’est bien d’y songer.
C’est gratuit ou presque. Et ça ne
dure que ce que ça ne dure.
Il y a des questions sur le comment
il fait, le gros bonhomme ? Mais il y a les lueurs dans les yeux, l’énervement
compréhensible et inévitable à cause de l’évènement.
Ensuite, c’est le lendemain matin, la
sauvagerie de l’ouverture, les ‘ah je l’avais commandé’, ‘ah c’est ce que je
voulais !’, ‘yes !’, ‘super !’.
Lui s’est levé à 8h30 après une nuit
moitié plus courte que d’habitude, est descendu, est resté devant le sapin puis
nous a rejoint dans notre chambre. Le Père Noël est passé, il y a des cadeaux.
Il y est retourné pour regarder
encore, pour observer, chercher de ses pupilles bien ouvertes son prénom sur
les étiquettes.
Il aura courageusement attendu le
lever de sa cadette vers 10h.
Je la réveillais doucement, lui
demandais quel jour nous étions. Le jour de Noël, le Père Noël est passé ?
Il y a des cadeaux ? demande t’elle comme premières phrases.
Juste le temps de sauter dans son bas
de pyjama et tout démarrait.
Nous avions notre cadeau à les
observer.
Le reste n’est plus que tournée des
grands ducs et des autres sapins familiaux.
Lorsque j’étais petit, je descendais
l’escalier, passais discrètement devant la chambre de mes parents, rejoignais le
salon en poussant la chaise qui bloquait l’accès au chien, restais quelques
minutes devant le sapin, me réjouissais, essayais de reconnaître les miens et
repartais rassuré mais toujours curieux. Ce n’était pas encore le matin mais je
pouvais attendre avant de sauter sur le lit des parents, puis avant de
réveiller ma grande sœur à grands bruits.
Je ne me rappelle plus si j’y croyais
encore ou non mais ce ne devait pas être très grave.
C'est immatériel.
En espérant que vos Noël se sont bien
déroulés.
Bien à vous et à bientôt.
Et merci.